CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES
Pour l'homme qui observe et étudie la nature, la considération des matières et
des corps qu'il apperçoit fait uniquement l'objet de son attention et de ses
recherches.
Par suite de cette considération suivie avec constance, il acquiert la
connoissance de beaucoup de faits ; il s'en forme des idées et les multiplie à
l'infinie, et bientôt il en obtient des connoissances sur les qualités générales
et particulières des corps, sur leurs distinctions, leurs rapports, leurs
actions réciproques, etc., etc., enfin il en obtient des idées, non absolues
mais relatives, du mouvement, de l'étendue, de l'espace, et de la durée.
Il remarque qu'il existe dans la nature deux sortes de corps infiniment
distinguées l'une de l'autre, que ces 2 sortes de corps se partagent
généralement tous les corps qui lui sont perceptibles, et qu'elles constituent
deux règnes primordiaux, qu'il importe de ne jamais confondre.
Les uns sont essentiellement des corps bruts, sans organisation et sans vie
réelles ; tandis que les autres sont des corps organisés complettement, quoique
d'une maniere quelconque, et doués de la vie, c'est-a-dire ayant certaines de
leurs parties internes plus ou moins en mouvement, ce qui constitue leur vie
active (I).
(I) On verra que la vie sans cesser d'exister dans un corps, peut être
suspendue au point qu'il y a cessation complette de tout mouvement organique ou
vital. Mais tant que l'intégrité de l'organisation n'est pas détruite, ce corps
n'a point subi la mort, et ne peut être encore rangé parmi les corps bruts.
Lorsqu'un corps vivant vient de subir la mort, quoique l'on puisse encore
reconnoître en lui les traces ou les restes de l'organisation qu'il a possedé,
cette organisation n'ayant plus son integrité puisqu'elle n'est plus propre à
l'exécution du mouvement organique, ce corps rentre dès lors dans le domaine des
corps bruts ; il est soumis à leurs loix, et il subit par l'effet de ces loix
des changemens dans ses parties qui effacent graduellement les traces de
l'organisation qui a existée en lui.
|